Guide de la permaculture
La permaculture au jardin potager, c’est vraiment pour tout le monde et pour tous les terrains ! Que vous soyez jardinier débutant poussé par l’envie de prendre en main votre alimentation, de manger des légumes bons et sains. Ou plus expérimenté, en recherche de solutions pour augmenter vos récoltes, tout en économisant votre temps et votre énergie. La permaculture apporte des réponses pérennes et efficaces, adaptées à chaque contexte. Ainsi, grâce à des pratiques douces et régénératrices pour la nature, vous serez capable de produire des récoltes abondantes sur le plus petit espace possible et sans vous épuiser.
Alors que le potager peut être énergivore et chronophage, la permaculture regorge de stratégies pour optimiser l’espace, l’énergie, le temps. Entrons tout de suite dans le vif du sujet !
Économiser l’eau
Collecter l’eau de pluie
L’eau est tellement précieuse au potager que vous devez y porter une attention toute particulière, et essayer d’optimiser sa collecte. Récupération de l’eau des toitures et stockage en citerne, collecte via une mare dans le potager, etc. toutes les solutions sont bonnes !
L’arrosage automatique
Que vous ayez une toute petite parcelle, ou un potager plus grand, l’arrosage en été peut devenir très chronophage, surtout si les pluies sont peu fréquentes. Vous aurez sans doute réfléchi à cela au moment de la conception de votre design (dont on vous parle un peu plus loin dans cet article), mais c’est important d’anticiper la question avant la pleine saison potagère. Un arrosage maîtrisé est un arrosage qui assure un apport régulier et juste par rapport aux besoins des plantes. C’est la meilleure façon d’en prendre soin, et de leur éviter les chocs thermiques à répétition.
Un arrosage maîtrisé évite les gâchis d’eau et d’énergie humaine. Pour cela plusieurs solutions sont à explorer, par exemple :
- Les systèmes de goutte à goutte programmables ;
- Les oyas, ces poteries à enterrer, qui délivrent la juste quantité d’eau grâce à la porosité de la terre cuite.
Composter, c’est recycler
Au potager en permaculture, on essaie de limiter le plus possible les fuites d’énergie. C’est pourquoi, le compostage est une pratique essentielle. En recyclant les déchets de la cuisine ou du jardin, on en fait une matière riche et bénéfique pour le potager. Un véritable or noir, capable de nourrir et de protéger le sol. Faire son compost est à la portée de tous. Il vous suffit de choisir la méthode qui vous convient, tant il y a de façons de faire : compostage de surface, compostage en tas, en composteur de jardin, en lombricomposteur, etc.
Cultiver sur la plus petite surface possible
Avoir un grand potager, c’est bien, mais avoir un petit potager, cultivé de manière intensive, c’est encore mieux ! Pourquoi ? Tout simplement, parce que vous dépensez moins d’énergie d’eau et de temps à entretenir un petit espace. Il vaut donc mieux commencer sur une petite surface, puis quand on maîtrise bien, s’étendre si besoin. Les zones non cultivées pourront être laissées en coins sauvages. Ainsi, elles ne demandent pas d’entretien et favorisent la biodiversité.
Concrètement, comment faire pour utiliser son potager au maximum de ses capacités ?
Étager les cultures
Qui a dit qu’il fallait cultiver uniquement à l’horizontale ? Laisser aller votre créativité et imaginez des systèmes en 3 dimensions. Expérimentez le potager vertical !
Donner de la hauteur au potager
Des surfaces où faire grimper les plantes, il y en a quantité à exploiter : les murs et clôtures, les abris de jardin, pergolas, etc.
Un mur est une aubaine ! En plus d’emmagasiner la chaleur, il permet à certaines plantes de se développer sans prendre d’espace au sol, moyennant la mise à disposition d’un support. On peut y faire pousser des petits arbustes comme les mûriers, framboisiers, vignes, kiwis, etc.
Construire des structures
Au sein même du potager, dans et entre les planches de culture, on peut installer différents supports. Treillis en formes de tipi ou de tente canadienne, grillages, tunnels, portiques accueillent joliment vos haricots à rames, petits pois, courges, concombres, melons, etc. Vos plantes potagères grimpantes ainsi palissées libèrent la place au sol pour d’autres cultures. Une technique à utiliser aussi pour le potager urbain !
Densifier et associer les cultures
Densifier les cultures, c’est faire en sorte que toute la surface de vos plates-bandes soit occupée par des plantes. Voici 2 stratégies pour optimiser l’espace au potager :
- Planter plus serré et en quinconce plutôt qu’en ligne.
- Mélanger les légumes sur une même planche de culture en intercalant des plantes à faible développement entre des plantes plus volumineuses. Par exemple, on peut faire pousser des carottes, des radis ou du basilic au pied des tomates.
Pour densifier vos cultures efficacement, on ne saurait trop vous conseiller de pratiquer les associations des légumes au potager. Au fil du temps, les jardiniers ont remarqué que certaines combinaisons de plantes cultivées ensemble étaient vertueuses.
On peut citer la fameuse association « les trois sœurs » qui mêle maïs, courge et haricot à rames :
- Le maïs sert de tuteur aux haricots.
- La courge en courant au sol, limite la pousse des herbes indésirables, et l’évaporation de l’eau.
- Le haricot fixe l’azote de l’air, et enrichit le sol ce qui profite ensuite aux autres cultures.
Autre exemple, l’oignon, l’ail, l’échalote ou le poireau protègent les carottes de la mouche Psila rosae, son principal parasite. En échange, la carotte repousse par son odeur la mouche mineuse, principal ravageur des cultures de poireaux, oignons, échalotes et autres plantes du genre Allium.
Ce qu’il faut retenir, c’est que plus on diversifie les cultures sur une même zone, plus ce milieu devient résilient. La polyculture, pratique incontournable du potager bio en permaculture, limite le développement des maladies ou aide à contrôler la présence des indésirables. Dans un milieu biodiversifié, ces derniers passent moins facilement d’une plante à l’autre. Ils risquent de tomber plus souvent sur des prédateurs naturels à même de vous en débarrasser, sans que vous ayez à lever le petit doigt !
Accélérer la succession des cultures
Bien connaître le développement des plantes
Là, ça devient un peu subtil. Accélérer la succession des cultures demande de bien connaître le cycle des plantes, leur temps de croissance. De cette façon, on peut prévoir combien de temps elles vont rester en terre, et quelle emprise elles auront au sol. À partir de là, il est possible d’établir un planning pour chaque plante prenant en compte toutes les étapes depuis le semis jusqu’à la fin de la culture.
Vous trouverez des calendriers de cultures en ligne ou dans les ouvrages de jardinage. Ils pourront vous servir de base, de repères au démarrage, mais ce sera à vous d’affiner en fonction de votre climat régional et de votre microclimat à la maison. Ensuite, au fil du temps, vous optimiserez cette organisation grâce à votre expérience, aux tests que vous pourrez faire, etc.
En parallèle, deux techniques permettent de gagner en productivité.
Démarrer les cultures hors-sol
En démarrant vos cultures hors sol, vous limitez le temps d’occupation des plantes au potager. Cela laisse ainsi la place à d’autres. Et puis bien sûr, cela vous permet de commencer une culture alors que les conditions extérieures ne sont pas optimum. À noter, que mis à part quelques exceptions, quasiment tous les légumes peuvent être démarrés en semis en pots, avant d’être repiqués en pleine terre. Avez-vous déjà tenté les semis en godets des pois, fèves ou betteraves ?
Chevaucher les cultures
Le principe, c’est de faire cohabiter des plantes à des stades différents de développement, plutôt que d’attendre la toute fin d’une culture avant de planter la suivante. Par exemple, au mois de septembre, on peut installer des jeunes plants d’épinards, de chicorées ou de choux asiatiques, sous une culture en fin de cycle comme la tomate. Le temps que la tomate termine sa production de fruits, les jeunes plants commencent à développer leur système racinaire. Puis, quand le pied de tomates en fin de cycle est supprimé (on laisse les racines en place et on paille le sol avec les parties aériennes), les nouvelles cultures ont déjà bien démarré. Elles profitent à leur tour pleinement de la lumière. On gagne ainsi un peu de temps sur les nouvelles cultures.
Choisir les végétaux à cultiver
Légumes vivaces, etc.
Le choix des végétaux à cultiver au potager est important, car il conditionne les stratégies ainsi que les efforts à mettre en place pour avoir d’abondantes récoltes. Privilégiez les légumes pérennes qui produiront plusieurs années avec très peu d’entretien tels le poireau perpétuel, l’asperge, l’artichaut, le topinambour…
Légume vivace excellent, l’asperge a toute sa place dans un potager en permaculture. Ici en association avec des fraisiers en couvre-sol avec lesquels elles s’entendent très bien depuis plus de 4 ans chez Magalie, en Limousin.Pour le choix des légumes annuels, choisissez en priorité :
- ceux qui poussent facilement dans votre climat ;
- et qui sont résistants à des maladies fréquentes au potager comme le mildiou ou l’oïdium (maladies cryptogamiques dues à un champignon).
Pour cela, rien de tel que d’observer ce que cultivent les jardiniers expérimentés autour de chez vous.
Si vous souhaitez malgré tout produire certains légumes peu adaptés à votre contexte, sachez que l’énergie à y consacrer sera beaucoup plus importante pour la même récolte. Cela vous demandera peut-être la mise en place d’un abri pour des légumes avec d’importants besoins en chaleur ou un arrosage conséquent pour des légumes gourmands en eau.
Encore une fois, tout dépend de votre contexte. Pour vous mettre sur la piste, voici un petit tour de France des semences adaptées à votre région : amis des Hauts-de-France, que diriez-vous de (re)découvrir le choux frisé grand vert du nord ? Vous vivez à l’est, peut-être serez-vous ravis de déguster une carotte de terroir, la carotte jaune obtuse du Doubs ? La rougette de Montpellier, cette laitue pommée d’hiver devrait faire son effet dans l’assiette des plus sudistes d’entre nous ? Quant aux Bretons, on vous envie le melon petit gris de Rennes !
Où trouver ces légumes ?
Voilà, vous avez fait le tour des catalogues de légumes vivaces et annuels, et avez choisi les variétés les plus adaptées à votre contexte. Vous salivez déjà à l’idée de déguster les fruits savoureux de votre production. Oui, mais, où trouver tous ces légumes ? Et puis, c’est un peu comme l’histoire de l’œuf et de la poule, faut-il partir de la graine ou du plant ?
Si vous êtes vraiment débutant ou que vous manquez de temps ou de place en intérieur pour organiser vos semis, il peut être intéressant de commencer certaines cultures avec des plants. Cela peut vous faciliter le travail. Essayez alors, dans la mesure du possible, de vous fournir auprès de pépiniéristes ou maraîchers locaux qui produiront certainement des variétés adaptées à votre région. Notez quand même qu’en faisant une partie de votre potager à partir de plants à repiquer, le choix des variétés sera beaucoup plus restreint. Il faudra aussi prévoir un budget plus conséquent que si vous partez de la graine.
En avançant dans votre apprentissage du potager en permaculture, vous serez sûrement de plus en plus tenté de réaliser vos semis vous-même. En partant de la graine, vous ouvrez en effet la porte sur le monde extraordinaire de la diversité végétale. C’est sûr, vous n’aurez qu’une envie : découvrir de nouvelles variétés saison après saison. Les semenciers bio deviendront vos partenaires de jardinage préférés, car ils sont les gardiens d’un trésor inestimable : des variétés de légumes par milliers, parfois anciennes, que vous ne trouverez pas en jardinerie traditionnelle. Mais surtout, ces graines sont reproductibles, c’est-à-dire qu’elles produisent des fleurs et des fruits dont les graines peuvent être récoltées, conservées, ressemées l’année suivante, et échangées avec d’autres jardiniers. Vous aurez le plaisir de cultiver l’épinard monstrueux de Viroflay, le poivron chocolat ou la tomate bonne fée.
En produisant vos graines vous-même, vous accédez à plus d’autonomie, car vous n’avez plus à acheter de semences. Cerise sur le gâteau : en sélectionnant les graines des plus beaux légumes de votre potager, celles-ci s’adaptent aux conditions de sol et de climat dans lesquelles elles évoluent, et deviennent plus résistantes.
Planifier son année au potager
Installer une citerne à eau, préparer les zones de culture, brasser son tas de compost, broyer les branchages, pailler, semer, planter, arroser, récolter… Le jardin potager requiert votre attention à différents moments de l’année.
Grâce à un design, il sera le plus économe possible, mais certaines actions ne pourront se faire sans vous. Faire le bon geste au bon moment est une question d’observation, mais aussi de planification. Voilà pourquoi, vous ne pouvez pas vous passer d’un temps de réflexion pour organiser votre année au potager.
Pour garantir la réussite de vos cultures, vous devez élaborer votre outil de pilotage. Son rôle est de vous guider tout au long de l’année en vous donnant les repères dont vous avez besoin. Il peut contenir les informations suivantes :
- la liste des légumes que vous souhaitez cultiver avec leurs dates de semis, et de repiquage ;
- un plan d’occupation des zones de cultures pour chaque mois, tenant compte des associations et des successions des cultures ;
- un calendrier mois par mois avec toutes les actions à réaliser ;
- le matériel nécessaire.
Améliorer votre écosystème
Prendre soin du sol
Ce qu’on adore avec la permaculture, c’est qu’elle offre des solutions à tout ! Et notamment, elle donne des clés pour faire pousser des végétaux dans n’importe quelles conditions.
Un sol vivant étant un sol suffisamment humide, aéré et riche en matière organique, votre mission numéro 1 consiste à en prendre soin. Voici comment.
Aérer le sol
Plusieurs stratégies s’offrent à vous. Surtout, n’hésitez pas à les cumuler !
La première consiste à prévenir le tassement du sol :
- en évitant le piétinement ;
- en le protégeant des effets climatiques (soleil, vent, eau) grâce au paillage.
Autre approche. En stimulant la vie du sol grâce à l’apport de matière organique – déchets de cuisine, compost, fumier, etc. – les vers de terre travaillent pour vous ! Ils digèrent la matière organique et forment des galeries pour se déplacer. Résultat : ils ameublissent le sol et l’aèrent !
Certains engrais verts sont aussi de précieux alliés : en s’enfonçant dans la terre, leurs racines décompactent le sol laissant ainsi pénétrer l’oxygène. La moutarde ou encore des céréales comme le seigle et le petit épeautre sont de bonnes candidates pour jouer ce rôle.
Assurer la fertilité du sol
Pour assurer la fertilité du sol, la règle de base, c’est de le nourrir en apportant de la matière organiquequi va se transformer en humus.
Pour cela, vous pouvez exploiter les ressources déjà disponibles sur votre terrain ou dans votre voisinage, et les étaler directement sur vos planches de cultures :
- déchets de cuisine ;
- tontes de gazon ;
- feuilles mortes ;
- bois broyé ;
- compost.
Certaines plantes comme la cousoude ou l’ortie sont de véritables plantes ressources au jardin en permaculture. Qu’elles soient ajoutées au compost, transformées en purins (extraits fermentés) ou tout simplement “coupées & déposées” au sol, elles sont idéales pour entretenir la fertilité du sol.
Encore une fois, les engrais verts et notamment les plantes de la famille des légumineuses aident à améliorer la fertilité du sol. Lentilles, lupins, fèves, pois captent l’azote de l’air (un des nutriments nécessaire à la croissance des végétaux), et le redistribuent au sol. Veillez néanmoins à les couper avant la floraison, sous peine de perdre l’effet nutritif recherché. Sinon, les plantes auront utilisé en partie cet azote pour produire leurs fleurs, puis leurs graines.
Si vous avez des poules, c’est magnifique ! Laissez-les travailler pour vous en leur confiant une partie de votre potager avant sa mise en culture. En grattant le terrain et en y déposant leurs déjections, le sol est amendé naturellement, sans effort de votre part.
Conserver l’humidité
Lorsqu’un sol est riche en matière organique et protégé par un mulch ou paillage, il garde un bon taux d’humidité. La matière organique se gorge d’eau comme une éponge, et constitue ainsi une réserve. Puis, grâce au travail d’aération des vers de terre, l’eau s’infiltre doucement dans le sol pour profiter aux plantes. De même, le paillage permanent isole du soleil et du vent, et évite ainsi l’évaporation. Et la boucle est bouclée !
C’est ce système vertueux que vous devez entretenir au quotidien pour obtenir un sol équilibré, une bonne terre de jardin pour la culture de vos légumes au potager.
Des solutions pour cultiver dans tous types de sols
On n’a pas tous la chance de démarrer avec un sol en bonne santé. Aussi, notre objectif est de créer les conditions pour tendre vers cet idéal, en donnant vie à notre potager en permaculture pas à pas.
C’est là où la permaculture est vraiment puissante : elle offre tout un panel de solutions pour différents contextes.
La culture en lasagne
La culture en lasagne est intéressante, car elle permet de démarrer rapidement un jardin potager en permaculture sur quasiment tous les terrains, et sans travail du sol. Il s’agit d’alterner différentes couches de matières, comme pour la célèbre recette de pâtes, d’où son nom. Pour plus de détails, rendez-vous sur notre article dédié à la culture en lasagne.
Cette technique est parfaite pour débuter son potager en permaculture. On peut aussi la réaliser en bac pour un potager sur le balcon.
Les buttes de culture
Les buttes de permaculture répondent à des problématiques spécifiques. Si elles sont très populaires, on souhaite vous rappeler que les buttes ne sont pas un passage obligé pour conduire un potager en permaculture. Et surtout, le choix du type de butte doit être minutieusement réfléchi, et pertinent dans votre contexte.
Si par exemple votre terrain est très humide, les buttes pourront apporter des solutions appropriées en surélevant vos cultures et en drainant l’eau. De nombreux permaculteurs ont cherché la meilleure façon de concevoir des buttes. Vous trouverez donc différentes méthodes, parmi :
- Les buttes de culture arrondies réalisées en décaissant la terre des allées.
- Les buttes, façon concentré de fertilité, faites à partir de bois enfoui dans le sol et d’autres matières organiques : les buttes Philip Forrer, les buttes HugelKultur de Sepp Holzer, les buttes sandwich de Robert Moretz, etc.
À l’inverse, en climat très sec, vous aurez tout intérêt à cultiver dans des plates-bandes décaissées qui favorisent la rétention de l’eau.
Favoriser la biodiversité
Être attentif à la Terre
Être attentif à la Terre est l’une des 3 éthiques de la permaculture. Cela implique que nos activités ne nuisent pas à la Terre, mais au contraire qu’elles la régénèrent et la protègent. L’objectif est de faire de votre potager en permaculture un écosystème équilibré. On ne va donc pas séparer le monde cultivé du monde sauvage, mais l’intégrer et même l’inviter. D’abord, parce que la nature a une valeur intrinsèque, mais aussi pour les services écologiques qu’elle assure. Comment ?
Les zones sauvages
Des zones sauvages à proximité de votre potager sont de vrais refuges pour la faune des jardins. Des herbes hautes ou un tas de branches laissés ici ou là offrent ainsi le gîte et le couvert à de nombreux animaux. Certains jouent le rôle d’auxiliaire en protégeant votre potager. Vous pouvez aussi leur donner un coup de pouce en fabriquant des hôtels à insectes, des nichoirs, des abris pour hérissons ou chauve-souris.
Les plantes mellifères
En cultivant des plantes mellifères (par exemple, les aromatiques comme la menthe, la sauge, le thym, le romarin, etc.), les insectes pollinisateurs comme les abeilles, bourdons, syrphes, papillons, viennent aussi visiter le potager.
Les effets de bordure
Les bordures ou lisières sont des lieux riches et variés qui accueillent de nombreuses espèces. La magie se produit quand deux milieux se rencontrent : une haie et une pelouse, une mare et une prairie, etc. C’est aussi dans la diversité des formes que s’exprime cet effet de lisière. Ainsi des formes complexes favorisent davantage la biodiversité que des formes simples. Voilà pourquoi en permaculture on crée souvent des zones de culture avec des motifs : courbes, spirales, en trous de serrure, en mandalas, etc.
La mare
La mare est un élément incontournable pour favoriser la biodiversité au potager. Même un petit bassin a un impact important. Bien sûr, il attire les grenouilles friandes d’insectes. Il offre aussi aux oiseaux, insectes et autres petits mammifères un point d’eau où venir s’abreuver.
Vous pensez à présent avoir les clés pour pratiquer la permaculture au jardin potager ? Vous y êtes presque ! Un dernier élément important doit entrer dans l’équation : le design, ce système qui a le pouvoir de transformer votre expérience du jardin potager grâce à une gestion efficace de vos ressources.
Importance du design
Qu’est-ce qu’un design ?
Concevoir un design : le cœur de la démarche de permaculture
Le design, c’est un outil de conception et de planification de projets permettant l’organisation d’activités humaines, et l’aménagement de lieux durables en accord avec les éthiques et les principes de la permaculture.
Cela est défini ainsi par son co-fondateur Bill Mollison, dans l’ouvrage Introduction à la permaculture : « Le but est de développer des modes de vie et de fonctionnement qui ne nuisent pas à l’environnement et qui soient viables économiquement, qui subviennent à leurs propres besoins, qui n’abusent ni des humains ni du vivant, qui ne polluent pas la terre, et qui, par conséquent, sont durables sur le long terme ».
Faire un potager en permaculture, c’est donc établir un système qui est :
- Efficace : il économise l’énergie, dont la vôtre.
- Productif : il vous nourrit.
- Autosuffisant : il fonctionne avec les ressources disponibles chez vous ou dans votre voisinage, avec peu d’intervention de votre part.
- Résilient : il est capable de survivre à des chocs imprévus (climatiques, attaques de ravageurs, maladies…) grâce à une grande biodiversité.
- Unique : il est adapté à votre contexte.
Prendre son temps pour en gagner
Vous êtes-vous déjà senti dépassé, épuisé par les travaux du potager ? Nous aussi, on a connu ça, faute de réflexion, tellement impatients de mettre les mains dans la terre ! Pour éviter de reproduire un schéma énergivore, il est nécessaire de procéder autrement, vous en conviendrez.
C’est donc le moment de prendre le temps de vous poser les bonnes questions. La méthodologie de design vous invite ainsi à définir vos objectifs personnels :
- Quels sont vos besoins ? Avez-vous envie d’autonomie pour vous seul, votre famille ? Ou de produire davantage pour partager avec votre entourage ?
- Quelles ressources pouvez-vous consacrer à votre projet ? Quel temps souhaitez-vous y dédier, quel budget pouvez-vous allouer, de quels outils et compétences disposez-vous, avez-vous des contraintes physiques ?
Ça, c’est la base du design. Mais pour obtenir un système adapté à votre contexte, d’autres éléments sont à prendre en compte, et passent par l’observation et la collecte de données sur votre lieu.
Observer et collecter des données
Découvrir le fonctionnement de votre lieu
Un principe phare de la permaculture est inspiré par l’un des pionniers de l’agriculture naturelle, Masanobu Fukuoka. Il est retranscrit notamment dans son livre La révolution d’un seul brin de paille, et invite à « travailler avec la nature plutôt que contre elle ».
Et pour cela, il convient d’abord de l’observer. Identifier les éléments naturels, leurs dynamiques, leurs potentiels, les éventuelles contraintes, bref, il s’agit de comprendre le fonctionnement de votre site.
Voici quelques éléments sur lesquels porter votre attention.
Le soleil
Vous pouvez commencer par observer l’orientation de votre potager et repérer les zones exposées au soleil, ainsi que celles qui sont à l’ombre. Ces informations, collectées sur plusieurs saisons, vous seront utiles pour placer au mieux vos zones de cultures, et pour choisir les végétaux adaptés aux différentes situations de votre potager.
Le vent
Repérez les zones venteuses et le sens du vent en observant la végétation : dans quelle direction penche-t-elle ? Mais aussi en passant du temps sur votre lieu pour mieux comprendre la façon dont le vent circule. Grâce à cette information, vous pourrez, si c’est nécessaire, prévoir la mise en place d’un brise-vent pour protéger vos cultures potagères.
L’eau
L’eau, c’est la vie ! Vous en aurez donc besoin pour arroser vos cultures. C’est pourquoi, il est important de repérer les sources disponibles sur votre terrain : cours d’eau, mare, puits, toitures pour la récupération d’eau de pluie, etc. Connaître la pluviométrie sur votre région vous permettra notamment de calculer les volumes d’eau de pluie récupérables chez vous et vous donnera une indication sur les besoins en eau à apporter à votre potager. Ces données, notées sur un plan, vous aideront à optimiser le trajet de l’eau sur votre lieu pour en stocker suffisamment pour vos légumes (baissières, cuves, mares…)
Le sol
Observez à présent votre sol. Est-il compacté ou meuble ? Est-il vivant ? Voyez-vous des vers de terre, beaucoup ou non ? Est-ce qu’il colle ou au contraire est-ce que la matière file entre vos doigts ? Est-il gorgé d’eau en hiver ? Bien comprendre la nature de votre sol vous permettra de choisir le bon support de culture, d’effectuer les bons gestes et d’amener des matières organiques adaptées pour le rendre plus fertile.
Les plantes spontanées
Avez-vous identifié les plantes sauvages qui poussent sur votre sol ? Y a-t-il une diversité des espèces, ou est-ce qu’une seule espèce a colonisé tout l’espace ? Certaines plantes sont appelées bio-indicatrices, car elles fournissent des informations sur le sol. Par exemple, un terrain couvert de liseron indique un sol lourd, compacté avec notamment un excès d’azote.
Les plantes ressources
Vous avez des haies ou des arbres sur votre terrain ? Savez-vous quelles en sont les essences ? Renseignez-vous sur ces végétaux pour connaître leur fonction : médicinale, comestible, fourrage pour les animaux, mellifère, refuge pour les oiseaux, coupe-vent, brise-vue, esthétique, fixateur d’azote, etc. Le sureau noir est ainsi un arbuste intéressant. Il accueille les nids d’oiseaux et nourrit les pollinisateurs, ses fleurs et ses fruits sont comestibles, il peut également être utilisé comme plante médicinale. Il est très vigoureux, et fournit chaque année de grandes cannes solides pouvant servir pour vos constructions au potager.
La faune
Profitez-en pour jouer au naturaliste en herbe et explorer la biodiversité animale : quels insectes, oiseaux et petits mammifères pouvez-vous observer ? Plus il y a de diversité, plus résilient est votre site, signe d’un écosystème équilibré.
Analyser
Les questions qui se présentent maintenant sont celles-ci. Après avoir fait l’état des lieux de votre terrain :
- De quelles fonctions avez-vous besoin au potager ?
- Quels éléments peuvent remplir ces diverses fonctions ? Zones de cultures, composteur, poulailler, récupérateurs de pluie, chemins, serre, châssis, abri de jardin, mare, haies, clôtures, etc.
- Quels sont les besoins de chaque élément ?
- Où devez-vous les placer sur votre terrain ?
Après une analyse guidée par les 3 principes de permaculture présentés ci-dessous, le travail consiste à réaliser un ou plusieurs dessins. Objectif : trouver la meilleure combinaison possible entre tous les éléments du potager.
Chaque élément doit remplir plusieurs fonctions
Voici un exemple : si vous souhaitez installer une haie brise-vent, celle-ci pourra être conçue de manière à remplir d’autres fonctions.
Selon les espèces de végétaux choisis, elle peut aussi :
- être comestible
- jouer un rôle esthétique
- favoriser la biodiversité
- apporter du mulch pour vos zones de culture grâce aux produits de sa taille
Pour citer deux plantes candidates multifonctions et souvent présentes dans les jardins :
- Le cognassier du japon : il sert de brise-vue en été, produit de jolies fleurs en fin d’hiver et des fruits appréciés des oiseaux. Son bois peut être broyé pour pailler ou alimenter un compost.
- Le lierre commun : il habille n’importe quel support tout au long de l’année, et constitue un refuge pour la biodiversité. On peut aussi faire de la lessive naturelle grâce à ses feuilles.
Chaque fonction doit être remplie par plusieurs éléments
En voici une illustration. Vous aurez besoin de collecter les eaux de pluie et de les stocker pour pouvoir arroser votre potager. Une première solution consiste à installer des citernes pour récupérer l’eau des toitures. Une autre option peut être de concevoir une mare.
Planifier l’efficacité énergétique ou comment placer les éléments du design en fonction de leur fréquence d’usage ou d’entretien
C’est ce que l’on appelle le zoning.
Les plantes aromatiques – ciboulette, persil, coriandre, etc. – seront par exemple placées tout près de la cuisine pour en faciliter la récolte et l’utilisation dans la préparation des repas. La serre devra être placée à proximité d’un point d’eau, mais aussi dans un endroit de passage, car les semis demandent un suivi minutieux.
À l’issue de tout ce travail de collecte de données, d’analyse et de dessin, votre design proposera un système unique, adapté à votre lieu et à vos besoins.
Pour autant, ce n’est pas un système figé. Celui-ci continuera d’évoluer pour être amélioré, optimisé au fil du temps.
Ce qu’il faut retenir de la permaculture
- Observez avant d’agir pour comprendre le fonctionnement de votre lieu, de la nature et éviter bien des erreurs.
- Prenez le temps de créer votre design global, puis continuez à l’améliorer.
- Favorisez la biodiversité notamment en conservant des zones sauvages même aux abords du potager.
- Nourrissez et protégez votre sol pour qu’il soit le plus vivant possible.
- Collectez, stockez et faites circuler au mieux l’eau sur votre terrain.
- Cultivez densément en associant les légumes entre eux mais aussi avec des fleurs, des plantes aromatiques.
- Laissez parler votre créativité, expérimentez, adaptez-vous à votre contexte.
- Et puis surtout, prenez plaisir, c’est encore ça le plus important.
Source : La permaculture